Allez! C’est parti pour l’interview de Jean-Paul Gaster, le brillantissime batteur de Clutch. Arrivée au Transbo, je passe sur la petite prise de tête avec les mecs de la sécu qui finissent quand même par aller chercher Oscar, le tourman de Clutch. Celui-ci me conduit directement à la loge où Jean-Paul Gaster m’attend. Et cool, le gars est vraiment accueillant et me met tout de suite à l’aise. On échange quelques banalités, et afin d’éviter tout malaise, je lui demande si pendant l’interview, il ne voit pas d’objection à ce que j’évoque la disparition de leur manager et ami Jack Flanagan. Jean-Paul me répond qu’il n’y a aucun problème. Et effectivement, il répondra avec une vraie sincérité. Le gars m’a vraiment touché et je le remercie d’avoir joué le jeu jusqu’au bout.
J’enclenche la vidéo et pose la première question avec un anglais balbutiant:
M-L: Clutch est en tournée pour 14 dates en Europe avant de jouer aux USA. Est ce que tu remarques des différences d’un public à l’autre?
J-P G: Non, pas vraiment. Le public de Clutch est le même mais réagit différemment selon l’endroit où on joue, je pense . Quelque soit le pays où on joue, chaque soir est unique. On essaie de donner toujours le meilleur de nous même, et le public nous le rend bien.
(Pendant que Jean-Paul me répond, je réalise que j’ai appuyé 2 fois sur le bouton d’enregistrement, ce qui fait, que la première question n’est pas enregistrée. Je ne dis rien, le feeling passe tellement bien que je ne veux pas casser l’ambiance. Du coup les questions s’enchaînent tranquillement :
M-L: Je crois que d’une date à l’autre, ce n’est jamais la même setlist qui est utilisée.Comment est ce que vous décidez des titres à jouer?
J-P G: On a développé un système, il y a plusieurs années, où on tourne pour écrire la setlist. Donc, ce soir c’est ma setlist, et elle est va être bonne. On va tester de nouvelles chansons et voir comment ça va le faire. Demain, ce sera celle de Neil, puis de Tim et ensuite celle de Dan. Et on tourne. Et on fait ça depuis 20 ans.
M-L: Quelle est la chose la plus fun qui te soit arrivée en tournée?
J-P G: Il y a beaucoup de truc drôles qui arrivent en tournée, mais je me rappelle avoir vu une interview de Dave Brokie qui chantait dans groupe Gwar, C’était un super mec, il nous manque. Il a dit un truc sur une question similaire: « la chose la plus dingue qui arrive en tournée, c’est que 1) On arrive à l’heure sur scène, 2) Tout fonctionne sur place, 3) Le son va bien et enfin, on fait le show sans se planter! » C’est difficile à dire, c’est toujours différent. Pour moi, le truc le plus fun, c’est de jouer devant le public et de voir les réactions des gens et je peux te dire qu’à Strasbourg (à la Laiterie) c’était la folie! Les mecs ont carrément perdu l’esprit, criaient et prenaient du bon temps.
M-L: Comment avez vous travaillé avec Vance Powell pour l’enregistrement de « Book of Bad Decisions »
J-P G: On voulait faire quelque chose de nouveau pour l’enregistrement, quelque chose de différent, dans un autre lieu. Alors on a juste écouté de la musique, et il y a eu 2 trucs que j’ai écouté sur mon Spotify et qui sonnaient vraiment bien. Y’avait un truc de Jack White et un truc de chez vous, Inspecteur Clouzot. J’ai écouté et j’ai trouvé que la façon dont était traité le son, le fait de planter des microphones tout en mixant le son c’était un truc unique. J’ai fait des recherches sur lui, on ne l’avait jamais rencontré auparavant. Alors une nuit je lui ai envoyé un mail et il a répondu dans la foulée, et on a entamé une très bonne relation. C’est un mec vraiment spécial. Je crois que le truc qui a fait que Book of Bad Decisions fonctionne, c’est que Vance est venu en tournée pour 3 dates avec nous. Tu sais, il a un passé d’ingénieur son Live et il a pas mal tourné. Il comprend comment fonctionnent les prises de son, comment ça réagit selon les lieux et comme on l’a dit avant, chaque soir est unique. Il a beaucoup écouté et observé et je crois qu’il a chopé plein d’idées pour le meilleur enregistrement que Clutch pourrait faire. Ça a bien matché et nous sommes vraiment content du résultat.
M-L : Est ce qu’il un a un autre album en préparation et allez vous demander à Vance Powell d’y contribuer?
J-P G: Ça se pourrait. On va recommencer à écrire pour l’année à venir. On verra. Vance Powell est surement une possibilité. On a eut une expérience très positive avec lui. Mais tu sais, on aime bien faire des trucs différents, et qui sait, peut-être que quelqu’un d’autre se présentera et on se dira, pourquoi pas. Alors pour le moment tout reste open.
M-L: Comment va le groupe depuis la disparition de Jack Flanagan?
J-P G: C’est dur. Je peux te dire que nous avons beaucoup pleuré. Il était une part très importante du groupe depuis les tous premiers jours et il nous manque. C’est arrivé trop vite.
M-L: Vous lui avez dédicacé une très belle reprise de « fortunate son » (Creedence Clearwater Revival). Allez vous la jouer ce soir?
J-P G: Oui. « Fortunate Son » est une chanson très sympa à jouer. Je pense que c’est une chanson importante qui peut avoir beaucoup de significations. A l’origine, c’est une chanson politique, mais je crois qu’on peut la considérer avec un spectre plus large . C’est une chanson inspirante et on a besoin de cela ces jours. C’est une chanson positive et c’est pour cela que je l’aime.
M-L : Clutch apporte sa contribution à « Innocent Lives Fondation ». Y’a-t-il d’autres causes dans lesquelles vous êtes impliqués?
J-P G: Biensûr. A l’époque de EarthRocker , on a fait faire 5 caisses claires avec un travail d’artistes graphistes dessus, qu’on a vendu. Jack Flanagan en avait d’ailleurs acheté une à l’époque. L’argent était reversée à des œuvres de charité. Celle que Jack avait acheté était pour la SPCA ( SPA chez nous). Il y avait d’ailleurs adopté un superbe chien. Ouais, on fait notre possible pour aider à des trucs comme cela.
M-L: Quel est pour toi le meilleur groupe que tu as vu sur scène?
J-P G: C’est ce soir! (rires) Mais oui pour moi, mon préféré, c’est celui qu’on va montrer ce soir, parce qu’on est là, et qu’on va faire un truc spécial. Nous n’avons qu’à nous emparer du lieu et donner le plus possible comme si nous étions le meilleur groupe qui soit. C’est comme ça qu’on fait des trucs vraiment spéciaux chaque soir. On a joué dans des lieux géniaux. Une fois, on était dans le Colorado à Red Rocks et c’était magnifique. Tu vois la scène avec autour de magnifiques Rochers rouges autour, c’était comme un amphithéâtre naturel. Le son était incroyable. J’aime jouer en extérieur, mais parfois jouer dans une salle obscure c’est aussi un challenge. En fait, j’aime jouer partout. Que ce soit avec 10 000 personnes ou 10 personnes, je suis toujours ravi. Quand le groupe est là, et qu’on prend du bon temps, que les gens sont contents, je suis content aussi.
M-L: Vous avez joué au HellFest aussi!
J-P G: Oh Oui! C’est un super lieu! J’aime ce festival. Toujours de bons groupes et le coin est vraiment beau. On a vraiment aimé.
M-L: Tu as joué plein de trucs différents durant toutes ces années. C’est quoi le style que tu préfères?
J-P G: J’écoute toutes sortes de choses. Je pense que probablement, mon inspiration à la batterie vient forcément du jazz. Parce que, pour moi, la batterie est un instrument jazz et c’est important de s’en rappeler. Pour moi, apprendre le Jazz et écouter du Jazz m’informe sur comment je joue de la batterie. Pour moi c’est plus facile. Il y a une raison pour utiliser la grosse caisse, et le Charley, et la caisse claire et la cymbale droite. Tous ces instruments sont joués « à propos ». Pour moi, le Jazz permet de comprendre comment on assemble tous ces instruments. J’ai donc pris beaucoup de cours de Jazz pour faire du Rock’n’roll. J’adore Dr John, John Coltrane, Miles Davis…Tu sais, tous ces mecs. J’aime ça et bien sûr j’aime le Rock’n’roll, et la musique de la nouvelle Orleans comme Professeur Longhair…
M-L: Voilà, c’était la dernière question. Tu aurais quelque chose à dire aux lecteurs de Mad Breizh?
J-P G: Oui bien sûr. On est vraiment content d’être ici, en France. Venez-nous voir en concert. On sera de retour cet été en festival dans le coin et on espère vous voir par là!
Sitôt l’interview terminée (encore merci Jean-Paul!) direction la salle de concert où je patiente un petit moment. Les gens commencent à arriver. Et hop, le temps de commander une petit bière et de saluer quelques connaissances, le groupe Kamtchaka entre en scène. Très franchement, bah ça sait jouer le blues en Suède! Pendant une petite heure, le Power trio nous a balancé une sauce blues rock assez pêchue et fort appréciable. La soirée s’annonce plutôt bien dis-donc!
Puis vient Graveyard, aussi originaire des terres froides de suède. Un peu trop froide d’ailleurs puisque le chanteur s’est choppé une extinction de voix et que la setlist a dû être remodelée à l’improviste sur scène. Bon à vrai dire, c’était pas top. Ça flottait un peu, pour du « planant »c’est un peu un pléonasme! Après, les goûts et les couleurs…
J’en profite pour aller me recommander une autres bière. Le bar est plein, tout le monde attend Clutch. Je mate le public, y’a du Hipster à tous les étages. WHAOU! Un parterre de sosies de Neil Fallon, (je ris intérieurement); J’essaye de discuter avec des gars ça et là, mais c’est un peu la douche froide. Sont pas très communicatifs les mecs. Dommage.
Allez, j’va faire un tour dehors, histoire de m’en griller une petite, puis une autre et encore une autre. Jusqu’à ce que Clutch arrive sur scène.
Là, pas de détail, le chanteur débarque sur Rats, sans guitare. Je suis impressionnée, y’a pas de mot. Une présence énorme sur scène, mais ça, je m’en doutais déjà. Je déguste chaque morceau avec délectation. Ça joue sévère, et franchement, le style de jeu de Jean-Paul est ahurissant. Ça groove du feu de Dieu, du coup je me rappelle que ce soir c’est lui qui a choisi la setlist et je comprends ses choix. Dan, le bassiste est juste à ses côtés en totale osmose pendant que Tim, le guitariste, déverse ses riffs, les yeux collés à son manche, imperturbable. Neil Fallon prendra sa guitare pour jouer quelques morceaux du dernier album, et nous aurons le droit en rappel à Electric Worried, repris en cœur par tous les fans qui se respectent et enfin, la très attendue reprise de Fortunate Son
C’était Clutch, j’en attendais pas moins.J’suis « toute chose »…Comme une vieille fan, quoi!
- Rats
- X-Ray Visions
- Firebirds!
- Passive Restraints
- Power Player
- Burning Beard
- The Incomparable Mr. Flannery
- Sea of Destruction
- Vision Quest
- Spirit of ’76
- Hot Bottom Feeder
- Mercury
- (In the Wake Of) The Swollen Goat
- Subtle Hustle
- Brazenhead (avec le clavieriste Per Wiberg)
- The Mob Goes Wild
- Electric Worry
- Fortunate Son