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Interview Patrón

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Mad Breizh : Bonjour Patrón, j’espère que tu vas bien en cette période particulière. Tout d’abord merci de nous accorder quelques minutes et encore bravo pour ce superbe album auquel je souhaite toute la réussite qu’il mérite.

Heureusement que l’entretien se passe par email finalement car même si ce n’est pas le moyen que je préfères, j’ai fait allemand seconde langue et je suis donc littéralement incapable de prononcer Patrón comme il le faut. 

MB : Pour ceux qui ne te connaîtraient pas, peux-tu te présenter rapidement ?

Patrón : 1m86, les yeux marrons, le poil soyeux.

MB : Peux-tu nous expliquer la genèse de cet album qui sera disponible fin mai ?

Patrón : J’avais des titres en réserve que j’avais maquetté chez moi. Mon autre groupe, Loading Data était en pause. Ca faisait un moment que j’avais en tête de monter un projet parallèle. C’était l’occasion ou jamais. J’ai appelé Alain Johannes (Queens of the stone age, Them crooked vultures, Eleven…), qui avait déjà produit le dernier album de Loading Data. On a convenu d’une date et on s’est envolé avec Aurélien Barbolosi pour L.A.

MB : Dans quel état d’esprit as tu écris ces morceaux ?

Patrón : Dans le même que d’habitude. A la recherche de la mélodie. Et là les mélodies me sont venues assez rapidement. Quand je parle de mélodie, je parle bien entendu du chant. Tout le monde est capable d’aligner trois ou 4 notes et de pondre des riffs et des gimmicks. Le plus difficile c’est d’arriver à écrire une bonne ligne de chant. Enfin pour moi du moins. Et en tant que chanteur, si je ne suis pas satisfait de la mélodie, le morceau ne verra pas le jour. Et crois moi des riffs j’en ai plein les placards. Ils prennent la poussière, et je mourrai bien avant d’avoir pu tous les exploiter.

MB : Quels ont été tes sources d’inspiration ?

Patrón : Je n’ai pas réfléchi à ça en composant. J’ai justement laissé libre cours à mon imagination sans m’imposer de limite. Je n’avais pas envie de me plier aux règles d’un genre particulier. Rien à faire de l’étiquette qu’on collerait au projet. Mais je pense que c’est un album dans lequel on retrouve un peu de toutes mes influences, qui sont assez vastes. J’adore la variété américaine des années 80, le rock de Seattle des années 90, la motown, le desert rock, les crooners des années 60, le rock n roll des années 50 et le jazz de toutes les époques. Tu mets tout ça dans un shaker, tu secoues bien fort et tu as Patrón.


MB : Comment s’est passé la rencontre avec les différents musiciens ? et avec Alain Johannes ? Comment tu les as motivé à participer à ce projet en sachant que derrière a priori ils ne seront plus présents pour les concerts.

Patrón : Comme je te le disais plus haut, Alain avait déjà produit Double Disco Animal Style, le dernier opus en date de Loading Data. On est devenu ami depuis. Ca fait déjà presque 10 ans. Les enregistrements s’étaient tellement bien passés la première fois que je savais déjà avec qui je voulais bosser pour ce nouveau projet. Il comprend ce que je veux sans même que j’ai à lui dire. Je lui fais écouter mes démos et ensuite je me laisse porter. J’ai eu la chance d’avoir Barrett Martin (Screaming Trees, Mad Season…) comme batteur sur l’album. On avait fait connaissance quelques années auparavant alors qu’il jouait avec les Mojave Lords, le groupe de Dave Catching des Eagles of Death Metal. J’avais toujours été fan de son jeu de batterie. On a sympathisé. Le jour J on a fait appel à lui pour qu’il vienne poser son groove sur les morceaux. Il joue sur la majorité des titres de l’album. Alain l’accompagnait à la basse. Ensuite sont venus Nick Oliveri (Queens of the stone age, Kyuss) et Joey Castillo (Danzig, The Bronx). On a enregistré 3 titres ensemble. Je connais Nick depuis presque 20 ans. Il avait déjà fait une apparition sur le dernier album de Loading Data. Et enfin Aurélien Barbolosi (Aston Villa, Elliott Murphy…), un copain de longue date, qui assure presque toutes les guitares de l’album.

MB : On se sent comment quand on enregistre le dernier album de ce studio mythique de LA ? Comment était l’ambiance lors de l’enregistrement ? Comment ça s’est passé ?

Patrón : J’avais mal au cœur de savoir qu’on n’aurait plus jamais l’occasion d’enregistrer dans ce studio. Studio qui était aussi la maison d’Alain. Là où il a vécu pendant 25 ans avec sa compagne Natasha Shneider (Eleven, Queens of the Stone Age, Chris Cornell Band). C’était un lieu unique, très spécial, riche en ondes positives, rempli d’instruments en tous genres. Une maison très chaleureuse où tu te sens forcément bien, où j’ai passé des moments inoubliables aussi bien cette fois que la fois précédente que toutes les fois où j’ai rendu visite à Alain quand j’étais dans les parages. De grands noms ont enregistré là-bas : Mark Lanegan, Eagles of Death Metal, Chris Cornell et j’en passe… C’était vraiment un havre de paix en plein cœur de Los Angeles. Mais Alain a dû se séparer de cette maison, et on savait en enregistrant que c’était la dernière fois qu’on y mettrait les pieds. L’ambiance était bonne mais il y avait ce nuage de nostalgie qui planait déjà dans l’air.

MB : Comment avez-vous enregistré ? (prise live ? Piste par piste ?) En combien de temps ?

Patrón : On a enregistré tous ensemble dans le salon de 11AD. On a gardé les basse/batterie et ensuite on a refait la plupart des guitares, on a ajouté des claviers et enfin le chant et des percus pour finir. J’y suis resté 1 mois et demi en tout.

MB : Un truc que je n’avais pas déceler à l’écoute, c’est le côté sexy de l’album (c’est pas comme si la pochette présentait une fille nue et le « Patrón » en rose)…. Est-ce quelque chose de rechercher ce côté sexy ? Quelle est l’intention derrière l’album ?

Patrón : Il n’y a pas d’intention particulière. Encore une fois, j’ai composé sans me poser de questions. J’ai pris ce qui venait. J’aime bien quand ça groove, quand ça swing, quand je peux imaginer les gens danser, ou ne serait-ce que remuer la tête. Rien n’est plus sexy qu’un morceau qui groove. La raideur d’une marche militaire ça ferait pas bander une tige de bambou. Led Zed c’est sexy à souhait, et en grande partie grâce à John Bonham et à son jeu au fond du temps. Un peu comme Barrett. Je pense que mon chant un peu « crooner » joue aussi un rôle et ajoute à l’atmosphère affriolante des titres.

MB : Par contre j’ai ressenti beaucoup d’émotions lors de l’écoute de ce disque, beaucoup d’ambiance, certains titres pouvant très bien coller en BO de films. Etait-ce une intention de ta part ? Est ce qu’il y aura un clip à venir dans ce sens ?

Patrón : En effet certains titres sont faciles à imaginer en images. Y’a un côté cinématographique qui s’en dégage. On avait plein d’idées pour des clips mais malheureusement le Coronavirus est venu foutre le bordel et on n’a rien pu tourner. Du coup on a monté les images des sessions à 11AD et on s’en servi comme clip pour Room with a view. Pour le 2ème single, Who do you dance for, on a profité du confinement pour faire appel à la créativité des gens.

MB : Pour le clip participatif justement de who do you dance for, on retrouve beaucoup ce côté sexy. Est-ce que c’était une consigne ou les gens avait libre choix ?

Patrón : Au départ j’ai hésité à demander aux gens de se déguiser façon années 80. Puis finalement j’ai eu peur qu’ils soient réticents, que ça les refroidisse, et comme je ne savais déjà pas si les gens allaient adhérer à l’idée, j’ai préféré mettre toutes les chances de notre côté d’avoir un maximum de participants. Et ça a marché puisqu’on a reçu une centaine de vidéos. J’ai été obligé de tricher, de rallonger le morceau, et j’ai dû faire un tri parmi les vidéos.

MB : Qui a dessiné ce logo de Patron (qui est très cool d’ailleurs) ? Le T à l’envers qui fait une croix renversée c’est volontaire ou bien juste une question de design ?

Patrón : Merci. C’est moi. J’ai fait appel à plusieurs graphistes mais ils étaient tous très pris, et c’était urgent donc je m’y suis attelé et en quelques jours j’ai obtenu ce résultat. Ouais le « T » à l’envers on m’a déjà fait la réflexion. Peut-être un peu sataniste ? C’est pas impossible.

MB : Pensons concert malgré cette période, avez-vous des plans qui se mettent en place ? Quel sera l’équipe de musiciens pour t’accompagner ?

Patrón : Evidemment très difficile d’avoir tous les musiciens de l’album, en live. Heureusement Aurélien assure ses propres parties de grattes. Sinon à la basse, c’est Rob Hudson (Atlas House), un copain Australien qui est lui aussi guitariste au départ, mais qui s’est mis à la basse pour l’occasion et enfin Simon Lemonnier à la batterie, qui a la lourde responsabilité de faire tenir tout ça debout. Comme disait Bobby Gillespie de Primal Scream « A band is only as good as its drummer ». Le batteur, c’est les fondations. Avec une fondation instable, tout l’édifice se casse la gueule. Jusqu’ici on a fait 4 dates. On a ouvert pour Alain Johannes lors de sa dernière tournée européenne en Octobre 2019. On avait à nouveau des dates en Avril de cette année en première partie d’Alain mais qui ont bien entendu été annulées. C’est reporté à Octobre si tout va bien. Sinon on a signé chez un tourneur néerlandais SOZ Concerts quelques temps avant tout ce merdier, et il nous a déjà booké une mini-tournée aux Pays-Bas en Décembre. On croise les doigts pour que ça puisse avoir lieu.

MB : Est-ce que vous allez-vous privilégier l’Europe et l’Amérique ?

Patrón : On va privilégier ceux qui veulent de nous. Nous, on prend tout. J’adore voyager alors plus on est sur la route, mieux je me porte. L’Europe, l’Amérique mais pourquoi pas l’Asie, l’Australie et l’ Afrique… On attend juste que la situation revienne à la normale mais j’ai pas l’impression que ça soit pour tout de suite.

MB : D’ailleurs tu fais quoi pour t’occuper pendant cette triste période ?

Patrón : Je bosse sur la promo de l’album. Je réponds à des interviews, je fais du montage pour les clips…. Je n’ai pas le temps de m’ennuyer. Ca m’évite de trop cogiter sur la crise qu’on traverse.

MB : Tu écoutes quoi comme musique en ce moment ?

Patrón : Ces derniers temps j’ai écouté beaucoup de musique Tiki : Martin Denny, Lee Baxter, Arthur Lyman.Mais aussi l’afrobeat électro de William Onyeabor, le dernier album de rock psyché arabisant de Al-Qasar ou encore Sonic Youth.

MB : Qu’est qui t’as amené à la musique, à former un groupe ?

Patrón : Je chante depuis que je suis tout petit. Ca vient peut-être de ma grand-mère, Hélène Regelly qui était chanteuse d’opérette. On écoutait aussi beaucoup de musique à la maison. Surtout du jazz. Et mon père adorait le jazz vocal. Mais en ce qui me concerne, le premier groupe dans lequel j’ai officié au chant s’appelait Mexican Dog Chow. J’avais quinze ans. C’était à mi-chemin entre du Red Hot et du Pearl Jam. Puis j’ai enchainé les formations jusqu’à prendre mon courage à deux mains et à monter mon propre groupe, Loading Data. C’était en 1999. Bientôt 21ans déjà. Mais mes premiers amours sont l’écriture. J’ai écrit 5 romans, non publiés à ce jour. C’est ce que j’aime par-dessus tout.

MB : Que devient Loading Data ?

Patrón : Loading Data hiberne. Louise joue dans plusieurs projets dont un groupe de Death qui s’appelle Decline of the I. Robin fait le son pour plusieurs groupes, en plus de gérer le son à Beaubourg et d’être papa pour la deuxième fois. Donc des emplois du temps bien chargés. Mais est de bons amis, on s’aime beaucoup et Loading Data reviendra un de ces jours, avec un nouvel album peut-être.

MB : Quel est selon toi le meilleur disque de rock de tous les temps ?

Patrón : Ouille. Tough question ! Je ne sais pas mais il y en a que j’aime beaucoup même si je ne l’ai pas écouté depuis des années c’est Temple of the Dog.

MB : Le dernier petit exercice rapide, des versus, tu choisis une réponse :

  • Paris vs LA : Impossible pour moi de choisir entre les USA et la France. J’ai grandi dans les 2 pays et je me sens aussi américain que français. Il y a des choses qui me manquent quand je suis à là-bas et inversement.
  • Queens Of The Stone Age vs Eagles Of Death Metal : Masters of Reality
  • Bière vs Vin : Margarita
  • Ampli à fond vs pédales d’effets : Ampli à fond avec pédales à fond
  • Bon restaurant vs Junk Food : C’est pareil non ?
  • Années 50’s, 60’s vs aujourd’hui : Années 50
  • Veste en Jean vs Veste en cuir : Cuir
  • Cinéma vs Netflix : Cinéma
  • Loading Data vs Patrón : Patrón n’existerait pas sans Loading Data.

MB : Un très grand merci pour ton album et pour tes réponses. On a hâte de retrouver ce groupe en live, vraiment, et encore Bravo.

Patrón : Merci Julien !!!.

Le premier album de Patrón sera disponible le 29 mai via Klonosphere et Season Of Mist.

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