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Druids Of The Gué Charette – Chronique Et Interview

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Chronique 

A l’occasion de la sortie du nouvel album des bretons de Druids Of The Gué Charette via Beast Records et Mauvaise Foi Records, nous avons pu nous entretenir avec le révérend Drop, chanteur chez les druides. 

Talking To The Moon sera disponible le 15 juin.

Les druides proposent ici près de 39 minutes de rock garage aux influences garage, post punk, psyché, teinté de fuzz. Le tout représente une galette, non pas saucisse, mais de bel et bien 11 titres. En ce qui concerne le son, on ressent tout de suite les essences que le groupe va chercher plutôt du côté des origines du rock que des sons modernes. Le son est clairement assumé à l’ancienne, le mixage est équilibré entre les différents instruments et le mastering n’est absolument pas orienté pour faire sonner l’album moderne. Le côté garage rock est bien présent et les morceaux flirtent parfois avec le punk et le post punk. La voix du révérend Drop alterne entre chant crié à la limite de la possession et vociférations druidesques dont seuls les bretons issus de Brocéliande peuvent avoir le secret. La guitare aérée laisse la juste place à la basse et au synthétiseur, le tout formant une soupe miraculeuse dont on se délecte avec grand plaisir.

Le titre It’s Allright To Fail Sometimes, dont les termes « It’s Alright » et « It’s Alright To Fail », représente à peu près les seules paroles chantées, criées, scandées, en boucles, en étant répétés respectivement 69 fois et 32 fois en un peu moins de 5 minutes, vous rappel ou vous convainc, qu’il est normal d’échouer parfois. Ce morceau ressort de l’album par son côté psyché, entêtant, dont le chant passe du cri à la voix de possédé, le tout sur une bande son répétitive gavée de synthé et un rythme de batterie soutenu mais pas trop. Le morceaux de presque 7 minutes se termine par quasiment 2 minutes d’outro, comme s’il s’agissait d’un générique de fin. Pourtant il nous reste bel et bien 6 morceaux à découvrir à ce stade de l’album. D’ailleurs, parmi ces 6 morceaux, se trouvent mes préférés.

En effet, l’enchaînement The Curse, Fading Away et Heartbeat ne vous laissera pas une minute de répit. 3 titres qui s’enchaînent parfaitement, 3 de mes morceaux préférés de cet album de grande qualité qui allie des sons du type premier album de The Horrors à des influences plus actuelles de type Idles. Le disque se termine sur Faking Emotion Is easy, une chanson qui commence en douceur avec un riff de guitare tout doux et une voix posée, calme. On sent la fin de l’album arriver et pourtant au bout de 1 minute 30 secondes, le morceau s’envole dans un ultime sursaut et vous rappelle que vous aviez bien à faire à un album de putain de rock.

J’ai adoré cet album, la voix y est percutante et vous invite à intégrer le cercle des druides. Les instruments typé fuzz, garage participent à faire de cet album une réussite totale, un disque cohérent et interprété avec brio. Le tout étant habilement mis en scène par une identité propre qui confère au groupe l’exclusivité de leur son. Une belle réussite musicale que l’on vous encourage fortement à soutenir. 

Ci-dessous, notre interview du Révérend Drop.

Interview 

Mad Breizh : Bonjour, merci pour ton temps. Pour les gens qui découvrent DOTGC, peux-tu nous présenter le groupe ? Membres, origine du nom ? D’où vous venez ?

Révérend Drop : Salut ! Les Druides du Gué Charette sont une secte bretonne ayant voué son existence à la célébration du bruit et du chaos. La branche musicale de la secte se compose actuellement de 5 membres (Révérend Drop, Grumpy K., Little B., Rey Revolt et Vince De La Rocha) auxquels s’ajoutent de nombreux autres fervents, anciens membres, ingénieurs du son ou encore guides spirituels… Le Gué Charette est un étang perdu du pays de Brocéliande, que dans une illumination du beau milieu de la nuit, notre guide suprême a décidé de nommer capitale symbolique et géographique de notre culte alors balbutiant.

MB : Depuis combien de temps vous jouez ensemble ?

RD : Le concept des Druids du Gué Charette en lui-même existe depuis déjà bien longtemps, et a connu de nombreuses incarnations, mais disons que dans sa formule actuelle, le groupe existe depuis 2015.

MB : Comment avez-vous monté ce groupe ?

RD : L’idée des Druides du Gué Charette était originellement de fédérer les musiciens des différents groupes de musiques amplifiées issus de cette partie de Brocéliande, de façon informelle et fluctuante. L’enregistrement de notre première K7 en 2015 nous a toutefois motivés à nous structurer autour d’un noyau dur.

MB : Comment pourrais-tu qualifier le son de Druids Of The Gué Charette ?

RD : Un déluge de fuzz et de réverbérations. Un mélange de garage et de stoner, saupoudré de psychédélisme et de post-punk, joué par des mecs en toges dans des salles enfumées.

MB : Talking To The Moon sortira le 15 juin, comment s’est passée la composition de cet album ?

RD : Très naturellement en fait, on voulait un disque qui ressemble à nos prestations live, dans lesquelles nos influences punk sont très sensibles, on a donc privilégiés des morceaux rapides et plutôt bruts, très peu arrangés, parfois limite lo-fi. On retrouve quand même des respirations et des morceaux plus lourds ou planants, mais dans l’ensemble on a quand même donné la priorité aux chansons taillées pour la scène.

MB : Qui écrit les textes ? Quels en sont les thèmes abordés ?

RD : C’est moi, Drop, qui me charge des textes. Avant tout, je me focalise surtout sur l’émotion qui ressort des compos et j’essaye d’avoir des paroles qui restent en adéquation avec celle-ci. Néanmoins s’il fallait déterminer une ligne directrice dans tout ça, je dirais que beaucoup de textes traitent de la vanité de l’existence et de la manière dont nous devons accepter cela, que nous n’avons aucune maîtrise sur nos vies, aucune connaissance des vérités qui sous-tendent l’existence, et de la manière dont nous nous débattons avec nos illusions.

MB : Est ce qu’il y a une thématique sur l’ensemble de l’album ?

RD : Il n’y pas de thématique unique qui s’appliquerait à toute les chansons du disque, néanmoins le morceau « Talking To The Moon » évoque lui-aussi l’incapacité de trouver un sens ou une perspective, et comment cela peut mener des individus au désespoir ou à la dépression. C’est une idée qui traverse la plupart des morceaux du disque, même si c’est traité avec une approche parfois empathique, parfois plus combative, et parfois carrément mystique. Quoiqu’il en soit ce titre symbolisait bien le lien qui unit une grande partie de ces chansons.

MB : Pourquoi avoir choisis de chanter en anglais ?

RD : J’écris en fonction de la musique, et il m’est d’ailleurs arrivé d’écrire en français dans d’autres groupes. Avec les Druides, les textes et les refrains viennent naturellement en anglais, probablement car la plupart de nos influences sont anglo-saxonnes. A un moment donné, c’est comme de choisir un ampli ou une guitare, tu fais des essais, et puis tu choisi ce qui sonne le mieux a ton oreille. Ca ne veut pas dire que l’ampli d’à côté était fondamentalement moins bon.

MB : Concernant l’enregistrement, peux-tu nous dire comment ça s’est passé ? Où avez-vous enregistré ? Qui s’est occupé de mixer/masteriser le tout ? Avez-vous enregistré en piste par piste ou en prises live ?

RD : L’enregistrement a eu lieu au Studio l’abri 101 avec l’ingénieur du son Arthur Paichereau, qui s’est occupé de tous nos disques. C’est plus qu’un très bon ami, c’est un membre de la famille, il nous connaît par cœur et il sait parfaitement comment nous amener vers ce qu’on recherche. Il s’est aussi chargé du mixage, par contre le mastering a été assuré par Loki Lockwood, que notre label Beast Records nous avait conseillé pour notre premier album et dont le travail nous avait soufflé. Concernant la prise de son, le studio étant parfaitement artisanal, on ne pouvait pas tout enregistrer simultanément, on a donc enregistré la base rythmique en live pour conserver un maximum de spontanéité, puis on a ajouté les autres instruments par-dessus.

MB : Le son est très brut, à l’ancienne, est-ce une volonté de faire sonner cet album un peu comme si il avait été enregistré dans les années 60-70 ?

RD : Ce n’est pas vraiment lié à une époque en particulier. C’est vrai que d’une part, clairement, on ne voulait pas d’artifice de mixage trop actuels, on ne souhaite à aucun prix sonner « à la mode » et on préfère faire sonner notre disque de manière la moins datée possible. Il faut dire qu’on a de grosses influences garage d’hier et d’aujourd’hui, et qu’on se retrouve totalement dans des partis pris qui font la part belle aux aspérités.

MB : Sais-tu combien de fois sont répétés les mots « It’s Allright » et « It’s Allright To Fail Sometimes » dans la chanson du même nom ? (réponse dans la chronique ci-dessus)

RD : Ah ah ah ! Non je n’en ai aucune idée ! En réalité la prise d’origine est encore beaucoup plus longue, on a joué le morceau jusqu’à ce qu’on n’en puisse plus, et j’ai hurlé jusqu’à ne plus avoir de voix ! Après on a laissé Arthur s’amuser avec les prises et faire disparaître la musique une fois que tout le monde a bien compris l’idée, ah ah ah ! En live aussi, c’est un morceau qui laisse une grande place à l’improvisation, donc ce n’est jamais exactement la même chose.

MB : Qu’est ce qui peut influencer votre jeu au sein de ce groupe ? (influences musicales, culturelles, sociétales)

RD : Oula, c’est compliqué de répondre à ça, tout peut influencer notre jeu, les concerts qu’on va voir, les groupes avec lesquels on joue, les disques qu’on découvre, les endroits dans lesquels on se produit et même le matériel qu’on achète ou qu’on ramène. Mêmes les films ou les livres viennent apporter de nouvelles idées ou de nouvelles manières de voir les choses.

MB : Peux-tu nous parler de la pochette de l’album (que je trouve très réussis), on peut y voir le cycle lunaire au-dessus d’une figure de Cernunnos ( ?). Quelle est la signification ? Quel(s) message(s) voulez-vous passer à travers cette illustration ?

RD : Déjà la forêt et la nuit sont deux thèmes qui nous sont chers depuis toujours, car ce sont des situations où notre regard ne porte jamais aussi loin qu’on le voudrait. Le cycle lunaire, tout comme l’image du crâne de cerf, tentent de transmettre l’idée d’un cycle, d’un éternel recommencement, dont la mort et les ténèbres sont une étape inévitable. Honnêtement, nous n’avions pas précisément pensé à Cernunnos en l’élaborant car j’ai simplement rêvé de ce motif. Mais si on interprète Cernunnos comme le symbole du cycle biologique de la vie et de la mort, autant dire que ça coïncide de façon troublante. L’artwork a été pensé pour la version vinyle, car les lunes y sont découpées et leur couleur n’est donnée que par la sous-pochette qui se trouve derrière, pour tromper toujours plus la perception et montrer que derrière l’image qu’on voit, il y a encore une autre vérité masquée. Cette idée de déchirer l’illusion a une dimension très psychédélique à laquelle on est attachée.

MB : Concernant l’actualité, êtes-vous optimiste sur la reprise des concerts ? D’ailleurs avez-vous des dates prévues ? Est-ce que les dates prévues au Hellfest et au Motocultor sont reprogrammées ?

RD : Nous croisons les doigts pour que les concerts reprennent le plus tôt possible, car notre musique n’a jamais autant de sens que sur scène. Pour l’instant nos prochaines représentations devraient avoir lieu en Octobre, le reste ayant été annulé. Le Motocultor a d’ores et déjà annoncé que nous serions reprogrammés l’an prochain, et il y a fort à parier qu’il en sera effectivement de même pour le Hellfest.

MB : Sous quels formats sera disponible cet album ? Où peut on se le procurer ?

RD : Le disque sera disponible au format digital sur à peu près toutes les plateformes cybernétiques imaginables. Il sera aussi édité en vinyle chez Mauvaise Foi Records et Beast Records, et devrait donc être disponible chez la plupart des disquaires indépendants un peu pointus. Et pour la première fois, on proposera aussi une édition CD.

MB : Vous avez sorti un clip pour le titre The Curse, pouvez-vous nous en parler. Qui s’est occupé du montage ? Quel est le sens de cette cérémonie ?

RD : C’est le réalisateur Anthony Roquet qui s’est occupé de la réalisation et du montage, car il était sensible à notre univers et à notre imagerie. L’idée derrière cette cérémonie était de transmettre l’idée d’une initiation, de pouvoir « contaminer » l’auditeur avec notre musique, et de le convertir à notre culte.

MB : Avez-vous prévu d’autres vidéos ?

RD : Nous devions initialement sortir une autre vidéo à l’occasion de la sortie du disque, que nous réaliserons dès que les mesures sanitaires nous le permettront. Il s’agira du morceau « Talking To The Moon ».

MB : Dans 10 ans on vous retrouve où ?

RD : Probablement le petit café-concert douteux, sombre et enfumé d’un bled paumé en plein cœur de Brocéliande, professant nos messes noires électriques devant un parterre d’adeptes fanatisés.

MB : Enfin un petit Versus, choisis une réponse :

o Fender vs Gibson : Fender

o Bière vs Hydromel : La Suze

o Motocultor vs Hellfest : C’est tout de même plus facile d’avoir une place pour le Motocultor

o Marshall vs Orange : Orange

o Ampli à fond vs pédales à gogo : Les deux, tout le temps.

o Restau vs Junk Food : Junk Food.

o Cinéma vs Netflix : Cinéma.

o Punk vs garage : Ca c’est dur. Mais plutôt Garage.

o 60’s vs 70’s : De 68 à 73.

o Label vs DIY : Label DIY

Merci beaucoup pour votre temps et bonne réussite à ce super album.