Au détour du festival Metal Earth, à Brest, l’équipe a pu rencontrer un groupe breton qui, de sa toute jeune formation, nous présente d’ores et déjà un premier opus. Je vous propose ici de découvrir Slaves Of Imperium. Ils nous parlent d’eux, de leur univers, de leur travail et donc de leur album nommé – en anglais – Observe, Analyse, Sanitize.
Mad Breizh : Bonjour, aujourd’hui interview des frères bretons Slaves Of Imperium. Salut les gars. On vous a vu le mois dernier au festival de Metal Earth à Brest le 9 avril, ce n’était peut-être pas une des premières dates mais j’aimerais déjà qu’on parle du fait que vous êtes une formation de 2019, une année avant ce souci sanitaire. Donc ça vous est tombé dessus !
Slaves Of Imperium : Salut. C’est à peu près ça oui !
Cédric (chant) : On commençait à faire de la musique et juste au moment où on a eu des compos et qu’on voulait sortir ; et bien en fait non. « Reste chez toi, reste dans la salle de répé ».
MB : Et du coup vous vous êtes formé comment? Vous êtes des potes ? C’est quoi l’histoire de Slaves Of Imperium finalement ?
Matthieu (Gratte) : En fait on se connaissait, on était trois personnes à se connaître d’avant car on avait tous des groupes et on avait partagé une scène ensemble il y a quelques années à une fête de la musique. On se rencontrait après les concerts. Donc Cédric, moi-même et David, on avait échangé nos numéros de téléphone dans le but de se recontacter pour éventuellement former quelque chose d’un peu plus violent ensemble.
MB : Donc en fait c’est le rassemblement de goûts musicaux que finalement vous n’aviez pas forcément avant. Là, vous êtes dans votre trip.
Matthieu : Oui c’est ça. Au début, on était trois. Après on a commencé à chercher un batteur et un bassiste et donc les voilà. [Raphael à la basse et Kristen à la batterie, mdr]
MB : Donc formation 2019, c’est une alchimie entre vous. Quelle est-elle ? C’est quoi votre univers ? Vous disiez vouloir faire quelque chose un peu plus dur. Alors quelle est votre motivation, votre inspiration ?
Cédric : En fait c’est assez drôle parce que je sais que moi, à une époque, personnellement c’était assez dur. Je me revois, je me disais tiens qu’est-ce qu’il peut me remotiver un peu ? En fait la réponse était de refaire de la musique et recontacter les zikos avec qui j’étais. Il y avait Matt comme il a expliqué, on s’est découvert d’autres groupes. On s’est envoyé chacun quelques compos pour voir l’univers de l’autre. Et moi à titre personnel, je suis plutôt Death Mélodique. Matt est plutôt très Thrasheux, et après ça dépend des membres. Raph est plutôt Black, Kristen est plutôt Punk Rock et Dav’ (Gratte) est Heavy/Stoner. Donc on s’est envoyé des compos : « Tiens ça c’est pas mal, ça, ça me plaît ». On les a modifiées pour que ça corresponde au goût de chacun et que musicalement ça plaise à tout le monde. Mais ouais, effectivement, la base c’était de partir sur quelque chose d’assez Death, d’assez Thrash.
Matt : Et encore je le redis, moi j’aurais plutôt tendance à dire que la base est plutôt Thrash et la voix Death par-dessus.
MB : J’ai lu que c’est toi et Matt qui faites les compos, mais finalement les autres membres du groupe, du fait de leurs influences, proposent aussi leurs idées, leurs rythmes qui peuvent amener quelque chose aussi dans la compo finale. C’est un travail d’équipe.
Matt : C’est une démarche démocratique. C’est sûr que pour la plupart des idées de fond c’est plutôt Cédric et moi-même qui les avons emmenées ; par contre à côté de ça on les joue en répèt’ et là, chacun ajoute sa patte. Chacun peut dire « cette partie-là je la verrai bien comme ça ». Et à partir de là, quand on compare la première fois que l’on joue le morceau est le son final, on sent bien qu’il appartient à l’ensemble du groupe.
Cédric : C’est d’ailleurs l’intérêt d’avoir un groupe. Je vois, on nous a souvent cité Matthieu et moi, mais l’intérêt d’un groupe, de jouer avec d’autres musiciens, c’est justement d’avoir une autre façon de faire. C’est ça qui est génial. C’est par exemple « tiens moi j’ai eu une idée, une proposition » et puis les mecs qui viennent et le modifient. C’est là où la musique prend vie. C’est pas quelque chose de figé. Il faut justement que chaque personne y mette son jeu et sa manière de faire.
MB : Le confinement qui arrive après votre formation, malheureusement pour le live c’est pas terrible. Mais finalement pour travailler les compositions, il y a eu beaucoup de boulot. L’album sort relativement tôt ?
Cédric : On aurait pu le sortir plus tôt, parce qu’en fait quand on s’est formé en 2019, comme on avait déjà des compos, on aurait pu le sortir en 2020. Le seul problème c’est qu’on a été retardé car il fallait qu’on passe en studio pour enregistrer la batterie. Et après il y a eu tout le temps de mixage. Et avec le confinement on a été retardé car les séances d’enregistrement de la batterie étaient tout le temps reportées. Mais moi personnellement je trouve que mettre trois ans pour sortir un album, c’est très long en sachant qu’on aurait pu le sortir fin 2020.
MB : Bon je n’ai pas trouvé l’info spécialement mais est-il auto produit cet album ou y a-t-il quelqu’un qui finalement a cru en vous dès le début ?
Matt : Non c’est auto produit à cent pour cent.
MB : C’est pour ça que tu peux effectivement trouver long de le sortir en trois ans. Et à propos de cet album qui propose donc dix titres, qui dure plus de 45 minutes, il est le fruit de beaucoup de travail avec 5-6 minutes par morceau avec notamment Masquerade [Titre N°4, ndlr], que j’ai bien aimé. Avec toi Cédric qui, je pense, fait toutes les voix. Car il y a le growl et il y a la surprise d’entendre autre chose de toi. C’est ce côté mélodique justement que tu aimes bien ?
Cédric : Oui. Après je sais que moi je suis guitariste à l’origine, je suis pas chanteur. Mais en tant que fan de Death Metal, on se disait que ce serait bien d’apporter de la variété. Pas toujours du Growl. Mais moi à titre personnel je sais que j’ai tendance, par rapport à plusieurs influences, à changer de tonalité pour éviter que ça fasse trop monotone. Oui j’ai rajouté du clair. Mais je t’avoue que ce n’est pas le registre où je me sens plus à l’aise, mais je pense que ça apporte quelque chose. Là, on est en train de bosser le deuxième. La voix évolue avec la musique. Pour la musique, y a-t-il besoin de telle ou telle chose, ou de telle ou telle voix. C’est là où je ne me mets pas de barrière. S’il faut mettre du Growl, je mets du Growl. Si ça apporte quelque chose, on mettra du clair. Pareillement, s’il faut mettre du Black ou une voix plus saturée, J’essaye vraiment de m’adapter à l’énergie de la musique.
Raph : Au début, quand on a commencé à répéter en 2019, il a pas mal travaillé son chant clair et apporté vachement de nuances dans ce qu’il fait. Au début il y en avait très peu et plus ça va, plus il y en a.
MB : Alors cet album, quel est son univers, quel est le message finalement qui se transmet ?
Cédric : Moi j’ai un concept qui était de développer un constat. Aujourd’hui on a beaucoup de grandes causes qui sont défendues à bon escient. Et moi je me suis toujours dit « j’ai envie de voir ce qui se passe à côté de chez moi ». C’est-à-dire que par exemple on voyait des groupes qui défendent l’écologie, qui défendent les droits des animaux, etc. C’est très bien. Mais qu’est-ce que vous faites quand vous regardez ce qui se passe à côté de chez vous ? Par exemple, on a déjà recueilli une gamine chez nous qui se faisait frapper par son père. Et c’est là où moi j’ai envie d’aller. Ce sont tous ces sujets un peu tabou, qu’on a pas envie de mettre sur le tapis mais qui existent, et qu’on a pas envie de voir. Après pourquoi observer, analyser, aseptiser ? Il y a une ligne directrice et le premier album est un constat de départ. On voit ce qui se passe. On fait une première observation. On essaye d’analyser comme on peut mais c’est dans la précipitation, c’est quelque chose d’assez énergique. Comment je dis « observer analyser aseptiser », c’est qu’au final ce que nous on va observer, c’est une démarche scientifique. Dans une démarche scientifique, on observe, on analyse et on tire une conclusion. Moi j’essaye de ramener ça à l’échelle humaine. Ce que j’observe, j’essaie d’analyser pour comprendre ce qui se passe. Pourquoi y a-t-il des choses aussi horribles qui se passent ? Et pourquoi je l’aseptise ? C’est pour l’accepter. C’est pour essayer de vivre avec. C’est pas un choix conscient ! C’est qu’au final, ce qu’on peut voir à côté de chez nous, chez le voisin, peut être tellement horrible que la seule manière de l’accepter c’est d’enlever toute l’essence humaine, toute l’essence émotionnelle. C’est là où je parle d’aseptiser. C’est qu’au final il faut aseptiser ces choses là car sinon tu ne peux pas en parler, tu ne peux pas le voir. J’essaye de ramener, notamment sur cette chanson Observe Analyse Sanitize, ce côté un peu scientifique ou dedans ça va parler de phénomènes de société. J’essaye d’avancer des arguments scientifiques. Par exemple, la joie que tu ressens après avoir éjaculé, c’est juste une dose d’endorphine. L’attachement que tu apportes à quelqu’un, c’est juste de la cytokine et de l’endorphine. C’est ça que j’essaye d’amener. Pourquoi j’ai ramené ce côté rationnel et pragmatique ? C’est parce qu’au final les sujets qui sont assez humains sont tellement durs à entendre, et tellement durs à accepter, que moi personnellement c’est la manière que j’ai trouvé pour essayer de vivre avec.
MB : C’est une sorte de rationalisation sans pour autant mettre les œillères ?
Cédric : On met tous des masques. Mais oui effectivement c’est un refus. C’est une manière de se voiler la face. Après on peut se voiler la face de différentes manières mais moi j’ai jugé que c’était plus intéressant de le voir d’un côté plus cynique et plus « réaliste ». Quand je dis réaliste, c’est analytique, scientifique. C’est se dire « moi ça me fait mal, alors pourquoi ça me fait mal ? » Et quand tu réfléchis à la chose, tu te dis que ça fait mal mais il y a tel ou tel mécanisme qui est en jeu. Et quand tu vois, quand tu assèches les choses, tu te rends compte qu’au final ça n’a pas autant d’importance que ça.
MB : Et c’est quelque chose que l’on a finalement au sein d’un groupe aussi ? Parce que, ce que l’on a là, c’est quelque chose d’assez personnel, c’est une vision que tu as, une façon de réagir face à ce qui se passe autour de toi. Mais les gars autour, je ne sais pas si vous avez quelque chose qui vous tient à cœur au sein du groupe ? Est-ce que ça fait partie de la composition de « débattre », d’échanger sur un sujet de chanson ? Même si c’est toi Cédric qui a plus la plume pour écrire au final. Mais il y a des sujets de tout le monde aussi ?
Matt : Ça se joue un petit peu comme avec la musique, c’est-à-dire qu’il y a un thème de base qui est amené. On échange dessus et chacun apporte un peu sa vision des choses. Après faut dire ce qui est, dans un groupe tel que le nôtre, chacun a vécu des choses difficiles à son niveau. On vient de mettre tout ça en commun, et les thèmes qu’amène Cédric sont un peu les fils conducteurs. Chacun vient ensuite mettre son vécu pour former le thème tel qu’on veut le mettre en avant.
MB : Finalement si chacun est impliqué dans ce qu’il joue, il est profondément raccord. Ça ne peut être que mieux pour le sortir en live, pour jouer sur scène. C’est comme ça aussi que l’on transmet quelque chose à son public.
Raph : Après c’est aussi Cédric qui ramène les paroles parce que c’est lui qui les expulse en live. Il y a donc beaucoup de sens que ce soit lui qui les ai pondu. Mais c’est vrai qu’on intervient de temps en temps sur les textes pour affiner telle ou telle phrase. Que ce soit un peu mieux cousu. On change un peu la structure de place mais c’est vraiment à plus petite échelle. Parce que c’est quand même lui qui pour les textes facilement et assez rapidement, et à chaud. Globalement à chaque fois ça donne beaucoup de sens et on se trouve toujours concerné par ce qu’il écrit. Il y a très peu remodelé derrière.
Matt : Ce qui est marrant c’est qu’on se retrouve tous un peu dans les textes que Cédric amène. Là où nous on intervient, ce n’est pas vraiment au niveau des textes comme de Raphaël disait, c’est Cédric qui fait ça. On va surtout pouvoir échanger sur les thèmes. Par exemple, entre Cédric et moi, on peut se dire que l’on ferait bien un morceau sur un sujet. On se demande « comment toi tu verrais les choses ? » Comme moi par exemple, je ne suis pas très doué pour faire les textes, je lui propose ma vision et il va me faire un texte où je vais pouvoir dire « à ouais ! C’est ce que je voulais dire ! C’est exactement ce que je pensais. » C’est le cas pour beaucoup de morceaux.
MB : C’est surtout très intéressant finalement que tu puisses faire retranscrire ta vision dans un texte dans lequel tu te retrouves finalement. Encore une fois ça permet aussi d’affiner la composition, comme sur un passage où tu sais que les paroles qui sont dites vont te débecter profondément et que musicalement tu vas le faire ressentir dans le riff, dans la façon de le passer. Finalement, en live, c’est quelque chose qui va te faire extérioriser tout ça.
Matt : Ça va dans les deux sens. Car aussi bien Cédric peut nous donner des paroles, dont nous sommes capables de comprendre l’univers qu’il a voulu mettre en avant, et on fait la composition musicale en fonction. Ou à l’inverse, on peut avoir une composition musicale et proposer à Cédric de savoir ce que ça lui évoque. Il peut nous répondre à quoi ça le fait penser,et il écrit les textes. C’est vraiment un échange.
MB : L’échange est toujours important dans un groupe. Il m’est arrivé de croiser les groupes où il y a un gars qui fait tout et même si c’est structuré, ça fait quand même quelque part moins vivant.
Cédric : C’est une autre manière de fonctionner. Après, comme j’ai dit avant, l’intérêt d’avoir un groupe c’est d’avoir plusieurs personnalités. Sinon tu fais un one-man Band et tu te débrouilles. Moi je sais que j’ai commencé comme ça. Je ne trouvais pas de musiciens alors j’ai tout fait tout seul. C’est du boulot par contre tu es tout seul dans ton jus et tu n’as pas d’oreille extérieure pour juger si ce que t’as fait c’est de la merde ou quoi.
MB : Et finalement alors cet album qui est sorti début 2022, vous le proposez en physique et en digital. Pour ce qui nous lisent, c’est dix euros en physique et six en digital. Et d’ailleurs quand on va sur le Bandcamp, il est agréable de voir que vous avez mis toutes les paroles. On peut finalement s’imprégner de ce que vous racontez.
Matt : Oui ça fait partie de la musique, les paroles. Il faut que les thèmes soient mis en avant.
Cédric : C’est d’autant plus drôle que souvent dans le Metal, les paroles ne s’entendent pas.
Matt : Pour le coup nous, on n’y accorde de l’importance.
MB : Je pense en effet que les gens apprécient ce genre de démarche. Pour revenir au live, du coup, le Metal Earth, ce n’était peut-être pas votre premier live mais c’était un beau rendez-vous. Ca dû vous permettre de vous éclater ?
SOI : Oui c’était chouette.
MB : Vous aviez peut-être déjà un petit peu tourné ? Avant de faire ce festival là ?
Kristen : C’était vraiment pas grand-chose, ça a été compliqué de trouver des dates, et ça l’est encore. On sent toujours l’impact du Covid pour trouver des dates, pour aller jouer un peu partout. Cédric : En fait, on a eu fait des dates mais dans le milieu alternatif. Donc c’était vraiment underground. Ce n’était pas du tout le même public, ce n’était pas la même orga. Donc là c’était intéressant. On se dit qu’on fait partie d’une programmation qui est, non pas classique, mais qui est Metal. C’était intéressant.
MB : Vous du coup vous sentez que vous avez un public qui vous apprécie, et vous vous êtes aussi content de les voir.
Kristen : Par contre apparemment, on était pas trop dans le style de ce qui se faisait dans la soirée, et du coup il y a certaines personnes qui étaient un peu déroutées. Mais ça fait partie aussi d’un fest d’avoir un peu de tout.
MB : Et sinon Cédric, c’est le festival qui te choisit ta veste aussi ? Tu avais une belle veste blanche pour la prestation. Je me demandais si finalement l’organisation du festival allait faire passer un peu votre musique différente avec un apparat un peu plus standard ?
[rires]
Cédric : En fait c’était une idée à moi. Je voulais créer un personnage. C’est pour ça que j’étais en blanc. Ce n’est pas encore abouti. Donc je vais revenir en arrière. Il y a des gens qui n’ont pas trop compris pourquoi j’étais en blanc mais c’était un projet, un concept. C’est en rapport à ce que je disais : le blanc c’est l’addition de toutes les lumières et malgré cette absence de lumière, avec nos paroles beaucoup plus sombre, c’est cette contradiction qui m’intéressait. Au niveau où on est c’est pas forcément compréhensible donc c’est encore à travailler. On a testé et je me suis gauffré.
MB : Franchement, rien de choquant ! Moi j’aime bien car dans les concerts que l’on peut faire, il y a toujours un décalage. Déjà ça démarque et finalement ça peut laisser un souvenir un peu plus attachant. Le principe n’est pas compréhensible par tout le monde ça c’est évident.
Matt : De prendre du visuel en live, on essaye des choses. On se cherche encore un petit peu. On prend les retours. Justement d’avoir des retours comme tu viens de le faire sont intéressants pour nous parce que ça nous permet de savoir ce que les gens en pensent.
MB : Le jeu de scène en soi, la physionomie de la scène, c’est quelque chose qui ce travail de long terme. Donc avec les circonstances actuelles vous n’avez pas le recul pour trouver peut-être votre style de scène. La veste blanche était le premier jet, les autres idées viendront après !
Matt : Ouais on a fait un concert dans un milieu alternatif, on était tous en costard. C’était intéressant et on a eu de bons retours. À voir si on la garde pour plus tard. On verra bien.
Cédric : On est encore à la période où on essaye.
MB : Et donc du coup pour les live, vous avez des dates ? Ça se débloque un petit peu ? Mollement peut-être ?
Matt : Au niveau des dates c’est un petit peu compliqué car toutes les organisations que l’on a pu contacter donnent priorité au groupe et aux artistes qui étaient programmés avant le Covid. Ce qui se peut se comprendre. Ça complique un petit peu la chose pour nous car on s’est formé vraiment juste au moment où la pandémie allait arriver. On ne se démotive pas pour autant. On va bosser.
MB : Oui tout à l’heure Cédric parlait des chansons qui sont en train d’être composées, travaillées pour le deuxième album. Sans vraiment trop dévoiler, car ça se travaille encore, ça avance ? Il y a-t-il un changement de thématique ? Ou y a-t-il une même lignée ?
Matt : Il y a un fil conducteur entre le premier et les albums à venir mais je vais laisser Cédric en parler.
Cédric : Comme j’avais essayé de l’expliquer, le concept d’observer analyser aseptiser à une première phase qui est d’observer. C’est un constat de ce qu’on voit et de réagir de manière précipitée. On a ensuite le côté analyse : je prends du recul et j’essaye de comprendre ce que je vois. Il y a le côté aseptisé qui lui dit « OK je vais assécher tout ça pour en développer quelque chose ». Le premier album est dans l’observation. Il est dans le constat. Il est brut. J’ai envie de dire qu’il est juvénile dans sa démarche. Le deuxième lui, en revanche, sera plus dans la deuxième partie de l’analyse. Et quand je dis analyse, c’est-à-dire que le deuxième sera beaucoup plus dur dans les paroles car justement on va chercher en profondeur les sujets dont on a parlé avant et qu’on remet sur le tapis.
Raph : Il est aussi plus précis dans les paroles et dans la description.
Cédric : Il sera beaucoup plus ciblé sur les thèmes. Et pour moi émotivement il sera beaucoup plus dur.
Matt : Musicalement il sera aussi beaucoup plus technique que le premier malgré que l’on cherche à garder ce côté rentre dedans, très Thrash, Death Metal. Il y a une technicité supplémentaire et un côté plus varié où on va attaquer plus d’influences différentes tout en gardant le rentre dedans.
Kristen : Il y a aussi le fait que le premier album était déjà composé par Matt et Cédric. Le deuxième, on y a apporté plus notre patte. On y a travaillé tous ensemble. Par exemple pour le premier album j’ai vraiment posé la batterie pour que ça aille plus sur la chanson. Sur le deuxième j’ai pu jouer plus comme je voulais sur les chansons. Sur certains titres, il peut y avoir autant de batterie que de riff de guitare par exemple.
Cédric : Ce qu’il y a de bien maintenant c’est qu’on peut proposer. Avant quand je composais ben je posais la batterie. Et là je me dis « bah au final je vais un truc standard pour marquer le temps et Kristen tu te débrouilles !». [rires]
Matt : Il y a des morceaux qui sont composés en répétition, entre nous. Il y en a un qui va amener un riff : « tenez les gars qu’est-ce que vous pouvez faire avec ça ? » Et au final on n’imagine jamais que ça va devenir un morceau complet. Et finalement avec ce qu’a proposé chacun, ça prend une tournure complètement différente et c’est ça qui est intéressant. Nous sommes un groupe ! Pour le premier album, malgré qu’on n’ait pas mal échangé, il y avait des compos qui étaient déjà faites. On les a modifiés pour les goûts de chacun mais le fond était déjà là. Tendit que là, sur le deuxième, on prend vraiment plus le temps d’échanger entre nous et de créer quelque chose qui correspond aux attentes de chacun.
MB : C’est ça qui est marrant car finalement, même dans votre démarche, votre fonctionnement, c’est pareil. Je vois Kristen, David, Raphaël, dans le premier album, ils ont entre guillemets observé même s’ ils ont apporté leurs pattes quand même. Et finalement dans ce deuxième album, il y a une vraie analyse de leur part. En fait tout est raccord. Le fait d’observer est le thème de votre album mais finalement, ça passe aussi pour vous. Vous disiez que vous allez passer dans l’analyse, ça deviendra plus technique, la technicité. Les musiciens sont là avec vous, font partie de vous, amènent aussi cette technicité et ce côté plus scientifique de la musique en elle-même. Finalement c’est une bonne démarche car tout se relie je trouve entre votre fonctionnement, qui vous êtes, est ce que vous voulez dire.
Matt : On ne l’avait pas vu comme ça mais tu n’as pas tort.
MB : Pour le troisième, faudra juste faire attention de ne pas aseptiser ! [J’ai tenté une vanne, mais j’ai été le seul à comprendre. Imaginez avec amusement un moment de solitude pour moi, ndr]
Cédric : Pour le troisième j’ai déjà des idées. Je trouve intéressant personnellement, en terme artistique, d’avoir une ligne conductrice. Je trouve ça important et je pense qu’il y a des morceaux avec des concepts forts, que ce soit au niveau des paroles ou de la musique, ça se ressent. Quand tu as vraiment ce concept là que tu essayes de défendre, ou à défaut que tu essayes d’entendre, ça apporte quelque chose qui est nuancé. On ne le ressent pas forcément dès la première écoute mais je pense que ça apporte de la profondeur à la musique.
MB : Cette façon de travailler autour de choses que vous avez vécu dans le passé, ça fait du bien finalement d’extérioriser tout ça et de l’analyser, ça aide ?
Cédric : Non ça aide pas. Moi personnellement je le fais parce que je me dis qu’il y a des choses que j’ai vu, que j’ai vécu qui ont besoin d’être dites. C’est là où je disais qu’au final avant de défendre de grandes causes, il faut déjà défendre ce qu’il y a à côté de chez soi. Mais c’est mon opinion. Par contre ça a un coût. Pour moi, sur certains thèmes abordés, c’est très difficile. Mais est-ce que ça vaut le coût ? Oui. Ça vaut le coût parce qu’il faut que ce soit dit. Il faut que ça se fasse. Après, moi je fais partie de l’école des artistes qui pensent que l’art sans souffrance n’a pas d’utilité.
Raph : Au moins ça décharge ! Ça ne résout pas le problème mais ça décharge toutes les semaines de venir expulser.
Kristen : (à Cédric) Tu sais si ça te fait du mal d’en parler il faut faire comme moi, tu tapes sur une batterie ! [rires]
MB : Peut-être que pour le troisième album c’est toi Kristen qui dira à Cédric « démerde-toi avec la batterie ! » Donc finalement ce n’est pas si facile que ça d’exprimer de telles paroles et bien que ça aide à expulser tout ça ça ne résout rien.
Cédric : C’est dur. Ça les extériorise dans le sens où tu parles de certains sujets mais c’est chercher les paroles qui te fout mal. Moi je me mets volontairement le nez dedans et après j’essaye d’extérioriser et de faire ce que je peux. Mais ce qui est dur c’est la composition. C’est le moment où tu cherches le sujet. Et selon le sujet, au final, tu vas tomber sur quelque chose d’affreux.
MB : Ce qui est dur certainement aussi c’est d’utiliser un vocabulaire que tu n’as pas spécialement envie d’utiliser mais tu ne vas pas y couper. Il y a ça aussi ?
Cédric : Je pense que ça donne du sens. Ça mérite d’être dit. J’ai cité des exemples simples. Par exemple, la dernière fois que j’ai écouté la radio, j’ai entendu une gamine de 14 ans qui se faisait harceler par des gamins à Paris. Ils l’ont jetée à l’eau parce que ça les faisait marrer. Sauf qu’ils ne l’ont pas repêchée. C’est le genre de sujet qui, moi, me détruit, qui me désole. Et c’est de ça que j’ai envie de parler. J’ai envie de dire « regardez-vous parler de plein de sujets mais regardez ce qui se passe près de vous ». Le pire dans tout ça c’est que c’est qu’en tant qu’êtres humains, on a un moyen d’action. Ce sont des douleurs de proximité et l’on peut faire quelque chose. Mais on ne fait rien.
Raph : Le but n’est pas non plus de faire un catalogue de faits divers, ou un peu macabre. C’est pas ça le but. C’est de tirer des conclusions. On essaie juste de faire avancer le truc, d’informer. Enfin, nous ne sommes pas journalistes donc c’est pas vraiment informer, c’est en parler. De faire plus attention à ce qui se passe.
Kristen : C’est en fait de parler de sujet considérés « de niche » alors que ça se passe partout.
Cédric : Ce ne sont pas des sujets de niche, ce sont des sujets de société. Je revois une époque où la notion de harcèlement scolaire est née à l’époque où il y a eu le massacre à Colombine. Et pourquoi un mec qui est rentré avec un fusil d’assaut dans un lycée ? Parce que comme tout être humain, comme tout être vivant, quand tu te retrouves dos au mur, quand on te met dans un coin, au final il ne te reste que l’attaque. Et c’est là qu’est née cette notion de harcèlement scolaire. Je me souviens qu’à une époque quand tu te faisais tabasser dans la cour, on disait « c’est normal, les enfants sont cruels entre eux ». Bah non c’est pas normal. Et c’est juste maintenant qu’on se réveille. Maintenant c’est trop tard le mal est fait et on est la merde y’a des gens qui pète des plombs qu’est-ce qu’on peut faire ? Et bien si vous aviez fait de la prévention, ça aurait peut-être été mieux.
MB : Je rebondi sur la composition d’une manière générale sur cet album. Ces paroles et ces sujets qui sont durs, dont il faut parler ; le style musical découle-t-il du sujet ou est-ce le contraire ? Par exemple, si vous voulez parler des papillons et de la nature, est-ce que ça serait encore du Death Metal ?
Matt : Quand le deuxième album sortira, tu auras les réponses à tes questions. Comme je disais tout à l’heure, on échange sur ces choses là. Il y en a un qui va amener la musique et qui va demander ce que l’on voit comme thème qui est va avec. Il y a des morceaux où il y a des thèmes atroces, il faut le dire, et en tant que compositeur, tu lis les textes de Cédric, Tu t’en imprégnes, et tu te mets dans la tête de la personne qui subit ses horreurs. Et du coup ça sort tout seul. Il y a un fort lien entre le texte et la musique.
Cédric : L’inverse marche aussi. Quand tu viens avec une musique et que tu es là en train de marmonner, tu trouves que quelque chose se dessine et tu viens là avec un titre provisoire. Et du coup j’essaye de broder autour.
Raph : Par contre, ce n’est pas du tout la seule manière de parler de ces sujets là mais nous c’est la musique qui est notre référent c’est que l’on aime jouer. Elles sont spontanément et nous font plaisir d’expulser. Et ça marche parfaitement avec ce milieu là. Je suis pas sûr que si on faisait du jazz, on parlerait de ces sujets là. Mais il y a d’autres styles qui s’y prêtent aussi : le Hardcore, le Punk. Nous, on est plus dans le Death, le Thrash et donc ça sort comme ça.
Cédric : Comme j’ai déjà dit, on est là pour faire du metal. On n’est pas là malheureusement, ou heureusement, pour parler des marguerites qui ont poussé dans le jardin ! Si on était tous pleinement sein dans notre tête et heureux, on ne ferait pas du Metal.
Matt : C’est clair.
MB : Du coup, pour ceux qui veulent vous suivre, il y a un réseau social ? Déjà vous êtes sur le BandCamp pour aller voir l’album pour pouvoir se l’acheter. Ensuite, il y a les réseaux sociaux. Lequel entre vous gère ce côté là ? Généralement, il y a toujours un spécialiste.
Raph : C’est Matt qui gère
Matt : D’ailleurs, il va falloir qu’on embauche quelqu’un !
Raph : Il y a Youtube avec un clip. On est assez content du résultat et il y en a un autre qui va sortir d’ici quelques mois normalement avec une petite surprise sur le style. On va tenter des trucs ! On expérimente aussi, on verra bien.
Cédric : C’est l’intérêt avec la musique : on ne se dit pas on va faire tel ou tel style. On va donner un nom à notre musique parce qu’il faut se faire référencer, mais au final on fait par rapport aux idées que l’on a.
Matt : On ne va pas s’imposer de limite sur des styles. Ce n’est pas parce que le premier album est essentiellement Death Thrash que ça sera le cas à chaque fois et pour toujours. On suit un peu les thèmes, et les émotions contribuent à ce que l’on produit comme style.
MB : Et finalement le nom de votre groupe a été trouvé peut-être assez tôt aussi dans votre formation ? C’est quelque chose qui vous représente aussi ? Car quand vous dites que le style va pouvoir changer entre les albums, ce qui est très bien, tout en gardant l’essence du groupe, le nom de Slaves Of Imperium représente quoi ?
Matt : C’est moi qui avait proposé ce nom de groupe. En analysant les thèmes de nos premières compos, la notion de Slaves Of Imperium – traduction : les Esclaves du Pouvoir Absolu – c’est le sentiment de se sentir esclave non pas uniquement de la société mais de tous les points de vue de la vie. On a beau vouloir faire des choses, il y a toujours quelqu’un qui tire les cordes de la marionnette.
MB : Oh toi t’es marié !
[rires]
Matt : Oui mais ne dis pas ça à ma femme !
[rires]
MB : Non mais j’ai bien compris que ça venait du cœur…
Matt : Au final, dans les situations de la vie, on a notre volonté à chacun mais en fin de compte on ne peut pas influencer la vie et la mort, on ne peut pas influencer ce qui se passe dans le monde en ce moment. Nous, tout ce qu’on peut faire à notre niveau, c’est de dénoncer ce que l’on voit. Donc quelque part ce nom de groupe il crée un lien entre nous et nos auditeurs parce qu’on est tous pareils, on est tous des esclaves du pouvoir qui nous entoure. Que ce soit au niveau de la société, au niveau politique, ou religieux. C’est vraiment très très large.
Raph : Et surtout le nom il claque !!
[rires]
MB : Je ne sais pas si j’ai omis quelque chose, On espère, avec Matt qui s’occupe des réseaux sociaux, boobook, Insta, BandCamp, YouTube. Vous êtes présents, y’a moyen de vous suivre. Vous avez peut-être un petit mot de la fin sur quelque chose auquel je n’aurais pas pensé ? Autre chose à dire de particulier ?
Raph : S’il y a des gens qui ont des salles et qui veulent nous voir jouer, qu’ils nous appellent ! On en veut !
MB : Ça oui, j’imagine bien. Et donc vous êtes du Morbihan mais j’imagine que ce n’est pas votre travail que vous en aviez un à côté ? Donc N’hésitez pas à contacter le groupe pour qu’il vienne jouer chez vous. Tiens David tu n’as pas été très bavard !
Cédric : C’est celui qui a un métronome dans le cul.
[rires]
MB : En tout cas les gars merci bien ! Plein de bonnes choses et surtout on n’hésitera pas à se contacter à l’occasion de la sortie du deuxième. Et si il y a un live dans le coin on continuera à parler de vous.
S.O.I. : Merci à toi.
Cédric : Il y a une question que je me pose : as-tu écouté l’album ? Qu’est-ce que tu en penses ?
MB : Comme je le disais ça m’a surpris sur certains titres comme Masquerade ou le titre éponyme de l’album, autrement moi le Death et le Thrash c’est moins mon truc, je suis plus dans le Heavy, dans « l’ancien », mais j’ai aimé les changements de voix et les riffs qui tabassent. J’ai trouvé ça bien. Donc il faut aller voir sur BandCamp pour écouter, télécharger, et bien sûr acheter l’album. Mais en physique aussi, c’est toujours sympa d’avoir un petit CD dans sa bagnole.
Matt : Pour ceux qui veulent écouter en streaming, il y a aussi Spotify et tout le bordel. Il faut l’acheter ! Je dis ça, je dis rien.
Raph : D’ailleurs il y a bientôt des T-shirts qui arriveront sur BandCamp. On les vendra.
MB : Bon, le mieux c’est d’aller sur votre page Facebook il y aura tous les liens utiles pour vous suivre. Toutes les infos pour le CD, l’album à venir, les dates de concert, et le merch qui va commencer.
Je vous souhaite donc une bonne soirée les gars et on se reparle très vite.
S.O.I. : Ça marche ! Merci beaucoup ! À la prochaine…