L’Ennui selon Guerilla Poubelle

Au cœur de l’actualité, ce ne sont pas les températures hivernales dignes d’un mois de juin en février, ni les menaces de coronavirus qui me donnent des frissons, mais bel et bien le dernier album de Guerilla Poubelle.

Avec la récente sortie d’Ennui, le trio punk présente son cinquième album. Sans prodromes, les parisiens l’ont proposé à la prévente il y a à peine 2 mois. Composé et maquetté durant une tournée de l’été dernier, enregistré et mixé à Montréal puis masterisé par Alex, ancien batteur du groupe, L’Ennui se compose de 13 titres pour une durée totale d’environ 30 minutes. Il est possible d’acquérir la chose en vinyle ou CD ou bien directement sur les plateformes de streaming. La pochette sobre mais efficace est signée Edith Boucher. En ce qui concerne le vinyle, j’ai reçu un joli disque coloré et les paroles sont suivis d’une courte explication avec quelques propositions de lectures afin d’approfondir le sujet abordé dans le titre. Une idée vraiment appréciable qui appui le côté engagé du groupe qui cite donc ici ses sources à la manière d’un travail de recherche. Cela me fait penser au « Onze Joueurs » d’Alexandre Vaillant (chanteur de Justin(e)), qui était offert lors d’une précommande d’un de leur album, dans lequel il expliquait l’origine de certains textes du groupe. On pourra donc se retrouver ici à lire, si ce n’est déjà fait, du Albert Camus, du François Bégaudeau ou encore du Cyril Dion. Je ne vous spoilerai pas tous les tuyaux accessibles et vous laisse le plaisir de les découvrir par vous-même.

Concernant le fond et de mon humble avis, le trio sort ici l’un de ses meilleurs disques. Si l’ensemble reste dans la veine de ce que sait faire le groupe avec une écriture sombre et bien ficelée, Les Frontières Du Présent, Qui Perd Perd, La Bataille De Paris, L’Aigle Et La Foudre, La Guerre Des Pauvres ou encore Mare Nostrum, sonnent comme de l’excellent GxP, avec également des riffs accrocheurs, un son gras et saturé, sans fioritures et des textes ô combien engagés. Mais l’album révèle aussi quelques pépites qui font plaisir. Ainsi, je vous propose d’écouter plus attentivement des titres comme La Chute, Vampire ou bien L’Argile et son refrain sur lequel vient pleurer la seconde guitare entre notes filées et larsens agréables. Ces titres restent bels et biens mes morceaux coup de cœur. De part son intro, Entre Booba Et Balkany se différencie du reste et se compose de 2 couplets, un pour chaque personne, entrecoupé d’un court refrain. L’ensemble des textes est clairement inspiré de l’actualité en abordant les dérives du capitalisme, l’ennui du quotidien, les violences policières, la supériorité malsaine de la masculinité, les politiques corrompues, l’accueil des réfugiés et la gestion de la crise migratoire, sans oublier Macron et son mépris de la classe ouvrière… A noter également, ne pas faire l’impasse sur le duo avec Noé Talbot, Passer l’Arme À Droite.

Bref, cet album fait du bien malgré tout, dans le sens qu’il tente de me rassurer sur la volonté de certains humains. Même si parfois je pense qu’on mérite seulement de disparaître, je me dis que nous ne sommes pas seuls, qu’il faut se ressaisir, prendre les choses en main, ne pas rester impassible à se laisser porter par ses préoccupations personnelles. Nous avons clairement à faire à un album punk dont la clef réside dans la bouleversante justesse de son propos. Parfois décrié, souvent incompris, Guerilla Poubelle sort une pépite bien nourrie de la pourriture ambiante.

Tracklist :

1 Les Frontières Du Présent

2 La Chute

3 .Qui Perd Perd

4 Apocalypse 6:12

5 La Bataille De Paris

6 Entre Booba Et Balkany

7 Le Casse Du Siècle

8 L’Aigle Et La Foudre

9 Passer L’Arme A Droite

10 Vampire

11 La Guerre Des Pauvres