Saint-Nolff, samedi 17 août
13h30, Massey Ferguscene, Shadyon prend place. Neuf ans après la sortie de « Mind Control », revoilà nos fers de lance du heavy progressif breton. C’est le début de l’après midi, et nous sommes directement plongés dans leur univers.
Emprunts de passages très énergiques et mélodiques, les titres emblématiques de leur répertoire défilent et le public est très vite conquis.
« La voix » d’Emmanuel Creis (fort de la reconnaissance du public et du milieu musical professionnel québécois dans l’émission du même nom) vient sublimer tout cela, car du talent il y en a sur cette scène ! Maël, frère d’arme de ce dernier n’a rien perdu de sa dextérité, David à la basse soutient un Walter très musical derrière les fûts.
Le quatuor nous gratifie même du single Tears In Lies du nouvel album qu’il viennent de mettre en boîte chez le maître du son métal Gwen Kerjan (Slab Sound Studio) que nous connaissons bien chez Mad Breizh. Sortie prévue début 2020, hâtez-vous de les découvrir si vous avez eu la malchance de ne pas assister à ce concert magique.
Leurs projets parallèles sont également de belle facture ( Equinox, Devoid dont on ne saurait trop vous conseiller d’aller jeter une oreille attentive), et je ne suis pas déçue. Devant une foule de connaisseurs, attentifs et renvoyant l’énergie que le groupe délivre, c’est carton plein. Show formidable, public réactif, son et lights impeccables, on en redemande!
La performance de Gronibard a eu lieu au bon endroit (la Supositor stage était l’endroit le plus boueux du site) et au bon moment (à l’heure d’arrivée des spectateurs encore saouls de la veille) pour permettre à tous un moment de déchaînement et d’euphorie qui fleure bon la Bavaria. Une ambiance digne de ce qui se passe au Macumba vers trois/quatre grammes du matin. Fidèles à eux-même, les joyeux lurons ont su mettre une ambiance déjantée avec un show d’une jouissive débilité. Patrick Sébastien n’a qu’à bien se tenir. On retiendra surtout l’impressionnant combat de boue que le public utilisait comme projectile d’abord sur eux, puis sur la scène et les équipements.
Par ailleurs le son était plutôt bon, Gronibard est en somme un groupe qui fait les choses sérieusement sans se prendre au sérieux. Pour les amateurs, sachez qu’ils ont profité du Motocultor pour annoncer la sortie d’un nouvel album en 2020.
Vient ensuite le moment tant attendu, Freak Kitchen ! C’est toujours un grand moment musical bardé d’humour que Mattias IA Eklundh nous délivre en concert et celui-ci ne déroge en rien à la règle.
Les suédois arrivent pourtant sur scène avec toutes les saintes raisons d’être agacés, leurs instruments ne sont pas encore sur le site, les frasques des transports faisant leurs œuvres. Il en faut bien plus pour entamer l’optimisme jovial du trio qui débute son spectacle par Speak When Spoken To, autant dire un de leurs plus célèbres titres. Impeccable, la chanson défile et la guitare de Mattias s’exprime avec toujours autant de feeling et d’inspiration. Je le compare aisément à Tom Morello de RATM, Audioslave et actuellement membre de Prophets Of Rage. En effet, Tom a été élu guitariste le plus inventif des années 90, car il a apporté à l’instrument des sonorités incroyables, inédites. Mattias est de cette trempe, je vous invite à vous jeter sur les albums du groupe pour vous en rendre compte.
Au bout de 4 morceaux, bonne surprise (sans doute due aux bonnes ondes diffusées par les musiciens!) les instruments arrivent enfin et c’est un festival dans le festival. Mattias nous apprend à parler suédois, les blagues fusent mais les extra terrestres scandinaves nous en mettent plein les oreilles. Réduire le groupe au seul génie de Mattias serait une erreur. Christer Örtefors et son casque de moto assurent le show, ce bassiste est complètement possédé, sans compter qu’il chante admirablement bien et Björn Fryklund martèle sans concession sa batterie.
Les influences diverses (pop, jazz, prog à la Zappa, mais aussi death metal ou plus metal classique) s’articulent autour d’une setlist très cohérente. Le public ne s’y est pas trompé, même si le groupe officie depuis le début des années 90, il reste une découverte pour beaucoup de festivaliers. A revoir sans modération !
Je passerais à nouveau un excellent moment en début de soirée sur la Supositor stage avec Decapitated. Il n’y pas pas grand chose à dire sur eux, sinon que leurs shows sont parfaits, musicalement, techniquement, et j’allais même dire physiquement, car voir un batteur tenir ces rythmes et ces blasts en fin de tournée avec autant d’endurance et de puissance me laisse toujours admirative.
Le quatuor de death technique polonais Wacław Kiełtyka, Rafał Piotrowski, Michał Łysejko et Hubert Więcek fait la part belle aux titres de leur dernier album Anticult. Le son est très fort (là encore) sur la Dave Mustage, mais la performance est tout simplement incroyable. Pour ceux qui aiment le death technique, c’est la référence pendant le festival. Rien à rajouter. Parfait.
Direction Trust… Une bien belle madeleine de Proust, un public qui revit sa jeunesse, même si la bande à Bernie et Nono a joué peu des vieux titres qui ont fait leur gloire. On passe tout de même un bon moment, l’énergie est là et on a la satisfaction d’être devant ce qui reste une partie du patrimoine français.
J’ai pris deux claques musicales particulièrement marquantes pendant cette édition du Motocultor 2019. Les polonais de MGLA est la première. La pluie s’intensifie et on fait très attention pour ne pas glisser dans la boue pour se rendre sur la Suppositor stage . Tout comme Freak Kitchen, les musiciens jouent de malchance juste avant le début du concert. En effet, une des guitares du groupe tombe, sectionnant sa tête et rendant donc injouable l’instrument. Cela n’entame pas les musiciens et ils sont bien décidés à nous offrir un sacré spectacle. Leur nouvel album « Age Of Excuse » fait suite à l’ énorme « Exercises In Futility », sorti 4 ans plus tôt. Nous avons droit aux versions live des ces derniers, ainsi que quelques titres des deux premiers albums. En polonais MGLA signifie « brume » « brouillard » (à l’instar des Norvegiens de Taake) et je puis vous dire que cela se prêtait tout à fait au lieu. Des morceaux longs mais jamais ennuyeux, un esprit black mélodique incroyable et j’ose dire, à des années-lumière de la scène post black qui n’a souvent qu’un intérêt visuel (et encore, on fleure tellement avec le cirque et le kitsch que l’esprit n’y est plus). La voix tient malgré une météo qui rend tout le monde un peu frêle autour de nous, les instruments sont très ambiants sans être mous, c’est une ambiance Black Metal malsaine et à la fois envoûtante. LA CLAQUE !
La soirée se termine pour moi avec Korpiklaani. Le chanteur Jonne Jarvela est ce soir en très bonne forme, cela fait plaisir à entendre ! Un set festif qui met d’excellente humeur et réchauffe tout Kerboulard.
Et maintenant, BEER, BEER !